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Réponse à Paul Ariès
Note du 11 février 2010 - Une prochaine livraison du Sarkophage, dont le responsable éditorial est Paul Ariès devrait proposer un article (voire plusieurs!) sur le tirage au sort. Nous, stochocrates, clérocrates et autres branchés du tirage au sort en politique ne peuvent que nous féliciter de cette opportunité! :) Cette "réponse à Paul Ariès" qui suit fait référence à un texte bien antérieur (2006)
Dans sa livraison de décembre 2006, la revue La décroissance publie un article de Paul Ariès titré Pourquoi nous sommes démocrates. Dans ce papier, il s'attaque de façon particulièrement brutale à la Stochocratie. Cet article est là pour y répondre...
Ci-dessous, vous trouverez en italique le texte de Mr Ariès (retranscrit par mes soins. J'en assume les éventuelles erreurs), et en caractères bleus, ma réponse.
Car il s'agit bien de MA réponse et pas "notre" réponse. Je ne prétends pas parler pour les autres.
Pourquoi nous sommes démocrates.
(par Paul Ariès, La décroissance n° 35 Décembre 2006)
[...]
Débat ou hasard
Reste une autre question: pourquoi, s'il nous faut des représentants, faut-il les élire?
La démocratie athénienne était fondée sur le tirage au sort, arguent les « stochocrates », tenant de la méthode aléatoire pour désigner les gouvernants. Cependant est-il certain que le tirage au sort soit la façon la plus efficace d'instituer du politique
Evoquer l'efficacité d'une théorie politique est un terrain fort glissant. Comment définir cette "efficacité" ?... Peut-être par le sentiment d'être plus ou moins bien représenté ? Rien de plus « flottant » ou « volatil »... La démocratie n'est pas efficace. Elle est résultat de compromis, rien de plus. D'autre part, efficace pour quoi faire ? Comme les socialistes en 81, efficacement élus et revenant non moins efficacement sur leurs promesses deux ans plus tard ?

lorsqu'on sait qu'il est issu d'une figure religieuse, celle du tirage au sort entre Zeus, Poséidon et Hadès pour le partage de la domination ?...
Ce lien avec la religion n'a RIEN à voir avec la stochocratie d'aujourd'hui. On y parle plutôt de statistique, mais tant pis.

La démocratie antique a, en outre, toujours complété le tirage au sort de certains magistrats par l'élection d'autres représentants. Le tirage au sort suppose que nous sommes finalement tous pareils.

Le tirage au sort ne suppose pas que nous sommes tous pareils, mais que nous avons tous et toutes la même VALEUR, celle de citoyen(ne). C'est le "minimum syndical", même pour un démocrate.


Si je suis un locataire minoriraire, aurai-je envie de voir élire des propriétaires commes gouvernants? Souhaitons-nous vraiment que le tirage au sort désigne des champions de l'idéologie croissanciste (type Sarkozy ou Ségolène Royal) ? Plus sérieusement : faire la promotion du tirage au sort revient à supprimer les appareils politiques. Derrière ce refus des idéologie, il y a l'idée d'un peuple homogène - le fameux « ni droite ni gauche », version soft du « tous pourris ». Chercher à éliminer les partis politiques revient à cacher les désaccords, et à refuser de pratiquer ce que nous appelons le « dissensus ».
Le tirage au sort ne cache rien des dissensions. Il se place simplement à un autre niveau dans l'organisation de la société. Au lieu de discuter avant, puis prendre le pouvoir, on discute "pendant". Une assemblée (il ne peut y avoir que des assemblées tirées au sort) sera PAR NATURE composée de gens DIFFERENTS, et cette assemblée devra parvenir à des consensus. Et ce ne serait évidemment pas une mince affaire, laissant toute sa place au débat. Sans compter qu'un tel système doit également faire entendre l'avis des citoyens par referendum ou toute autre méthode.

La démocratie est inséparable des partis politiques. Ce n'est pas pour rien que les totalitarismes ont toujours institué le « parti unique » comme aujourd'hui en République populaire de Chine.

La stochocratie explose les partis. Les décisions se prennent en assemblées, composées d'êtres humains aussi divers que possible. Il ne peut donc pas y avoir de « parti unique » stalinien. Cette référence a pour but unique de salir une idée simple, de la détruire dans l'oeuf avec un amalgame ridicule. Passons.


Ce n'est pas par hasard que les champions du marketing politique se donnent pour objectif de casser les grandes idéologies et les partis politiques pour pouvoir créer l'électeur « flottant » ou « volatil », à l'image du consommateur flottant hésitant entre deux produits substituables. Cette destruction des partis et des idéologies est indispensable pour que le cigare de Clinton ou les frasques du couple Sarkozy viennent remplacer dans kles débats les réflexions sur le contenu des projets politiques.
Le cigare de Clinton n'est pas un problème de démocratie... quoique : si les lecteurs ne s'intéressaient pas aux « sujets de canivaux », il n'y en aurait pas dans cette « presse » qui cherche toujours les sujets les plus vendeurs. Nouvel amalgame scandaleux.

Entendons-nous bien : les objecteurs de croissance doivent aussi tirer les leçons de l'histoire et réfléchir à une forme de parti ou mouvement politique qui ne soit pas une copie des appareils staliniens.

Etat de faits
Le refus de la démocratie représentative cache souvent la haine de l'Etat. [...]
Je trouve le système stochocratique fort intéressant, mais je considère aussi l'Etat comme important. Ce n'est pas incompatible. C'est une fois encore un amalgame. La stochocratie modifie la manière de désigner les représentants, RIEN DE PLUS. La structure administrative n'y a RIEN A VOIR.
Il n'existe pas de système parfait. Dans le système actuel, la décroissance ne viendra pas par la politique mais par la chute du système commercialiste... si elle arrive jamais. La stochocratie n'est pas parfaite. Rien ne l'est. Elle a cependant de nombreux avantages par rapport au système actuel. Le point important est qu'elle déplace le lieu de discussion du Politique. Les idéologies ne disparaissent pas, mais s'expriment différemment, dans l'exercice du pouvoir : les décisions d'une Assemblée Stochocratique seront résultats de discussions entre citoyens ayant des points de vue différents. La stochocratie n'est certainement pas la démocratie telle que nous la définissons aujourd'hui, mais elle est l'inverse de la dictature, même molle.
Ceci dit, que Paul Ariès et ceux qu'il dit représenter soient démocrates aurait plutôt tendence à me rassurer! ;-) Je lui dénie cependant le droit de refuser aux autres, par ses exagérations, toute capacité de réfléchir à un meilleur système.


Michel Dussandier le 9 février 2007

Il est démocratique que les magistratures soient attribuées par le sort, et oligarchique qu'elles soient électives